La Journée mondiale de l'enfance, le 20 novembre, afin de promouvoir le respect et les droits des enfants
Hommage aux enfants réfugiés et immigrants au Canada : Partie 1
Les enfants, surtout s’ils sont immigrants ou réfugiés, font face à des défis très particuliers à l’heure actuelle. Qu’ils aient de la peine à apprendre la langue, à se faire accepter par leurs camarades ou simplement à comprendre notre culture, les enfants des nouveaux arrivants traversent une période très difficile. Je me souviens d’une de mes camarades du secondaire qui venait d’arriver au Canada de la Corée. Elle m’a dit qu’elle devait aider ses parents à remplir leur déclaration d’impôt, appeler leur fournisseur de services téléphoniques et prendre leurs rendez-vous médicaux. Nous avions à peine 16 ans et aujourd’hui, à 22 ans, je vous dirai honnêtement que je ne sais même pas remplir mes propres déclarations d’impôt! Mes amis qui arrivent au Canada avec un statut d’immigrants ou de réfugiés me disent qu’ils ont souvent l’impression d’être les parents de leur famille. Les enfants de réfugiés et d’immigrants doivent souvent assumer des responsabilités très particulières dont les enfants canadiens n’ont jamais à se préoccuper. Les parents des enfants de réfugiés et d’immigrants doivent, comme leurs enfants, s’adapter à leur nouvelle vie; parents et enfants font donc face à des difficultés similaires.
En effectuant quelques recherches pour écrire cet article, j’ai découvert un rapport de la Société canadienne de pédiatrie soulignant que la plupart des enfants et des jeunes adultes réfugiés souffrent du syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Il est bien évident que ce trouble se manifeste de façon différente suivant l’âge de la personne. Il est souvent la cause d’un mauvais rendement à l’école, d’angoisse de la séparation, d’un sentiment de culpabilité, d’accès de colère. On considère souvent ces symptômes du SSPT comme de la paresse, l’incapacité de se concentrer, un manque de maîtrise émotionnelle ou de l’immaturité.
J’ai souvent observé, pendant mon enfance et après cela, que les enfants réfugiés ou immigrants sont victimes d’intimidation dans les couloirs de l’école. Cela me fait penser à cette petite réfugiée de 9 ans, Amal Alshteiwi, qui s’est suicidée parce qu’elle subissait de l’intimidation dans son école de Calgary. Les parents d’Amal se sont plaints à l’école parce que leur fille se faisait gravement intimider. Ses agresseurs la traitaient de fille stupide, laide, ils lui conseillaient de se suicider. Ces attaques ont duré jusqu’à ce qu’Amal ne puisse plus les supporter. Malheureusement, le Conseil scolaire n’a toujours pas confirmé qu’Amal avait été victime d’intimidation.
Amal est loin d’être la seule victime d’intimidation. J’ai trouvé un article rédigé par Samra Habib, dont la famille a dû fuir le Pakistan parce que les membres du groupe religieux auquel elle appartenait risquaient d’être persécutés. Au Canada, elle décrit sa classe d’anglais langue seconde comme une oasis de protection. Une fois le cours terminé, elle a dû se joindre à une classe ordinaire, où elle a commencé à subir de fortes attaques d’intimidation. Verbale et physique, cette intimidation soulignait les énormes différences qui la distinguaient de ses camarades de classe. En lisant le récit de Samra, j’ai été frappée par le fait qu’elle parlait plus d’aider sa mère apprendre l’anglais après l’école que de l’intimidation dont elle avait été victime. Elle avait elle aussi essayé de se suicider. Heureusement, elle a survécu. Elle comprend mieux maintenant les répercussions que ce traumatisme a causées tout au long de sa jeunesse.
Les défenseurs des causes des réfugiés et des immigrants se plaignent depuis longtemps du fait que les gens pensent que ces nouveaux arrivants devraient être reconnaissants d’être chez nous et oublient de les accueillir avec sincérité. J’ai souvent pensé à cela. Notre société est parsemée de communautés vulnérables, et nous ne répondons pas à leurs besoins comme il faudrait. Les écoles ont une occasion rêvée de préparer les enfants à la vie, alors je ne comprends pas pourquoi elles ne font presque rien pour soutenir les élèves traumatisés d’avoir été arrachés à la vie quotidienne de leur pays d’origine. Les enfants réfugiés et immigrants ont développé une plus profonde expérience de la vie que bien des enseignants et des adultes de chez nous. Il est grand temps d’apporter un changement profond à la culture canadienne. Nous nous dissimulons souvent derrière une façade de multiculturalisme sans vraiment adopter ces notions de diversité et d’acceptation. La première étape de ce changement serait de soutenir les enfants réfugiés et immigrants et de créer pour eux un milieu dans lequel ils se sentent acceptés et en sécurité afin d’apprendre, de grandir, de s’adapter et de guérir.
Hommage aux enfants réfugiés et immigrants au Canada : Partie 2
L’intimidation et le mauvais traitement des enfants réfugiés et immigrants découlent d’un préjugé face à leurs antécédents ethniques, à leur culture et à leurs différences. Et pourtant, un grand nombre de ces enfants sont devenus militants et ont apporté d’énormes changements dans notre société. La souffrance et les difficultés de leurs communautés marginalisées ont incité plusieurs d’entre eux à apporter des changements positifs dans la collectivité. Nous avons beaucoup à apprendre de ces jeunes. Il est toujours bon d’apprendre de personnes qui ont vécu des expériences que nous n’avons pas connues.
J’ai discuté avec Rayan Ali, un étudiant du programme commercial international de l’Université Carleton. Sa famille a immigré du Kurdistan pour se réfugier chez nous quand il avait un an. Quand je lui ai demandé ce que l’on ressent en grandissant au Canada, il m’a répondu qu’il ne pourrait pas me dire ce que les autres enfants réfugiés ressentent, ajoutant qu’un grand nombre d’enfants ont vécu une enfance beaucoup plus difficile que lui. « J’ai eu la chance d’arriver au Canada quand j’étais très, très jeune, alors j’ai vite appris la langue. Je comprends cependant les difficultés que les autres enfants immigrants et réfugiés ont connues », m’a t il dit. Quand je lui ai demandé quelles sont ces difficultés, il m’a répondu que ses parents comptent encore sur lui pour rédiger des courriels, faire des appels téléphoniques et comprendre des factures. Étant l’aîné de quatre enfants, Rayan a toujours été responsable d’aider ses parents. « Quand j’étais au secondaire, mes parents ont ouvert un restaurant. J’avais tellement de responsabilités pour les aider que j’avais de la peine à faire mes devoirs. J’ai l’impression que je dois faire plus d’efforts que les autres pour réussir, parce que depuis tout jeune j’ai beaucoup aidé mes parents. J’ai l’impression de devoir réussir pour les remercier de tout ce qu’ils ont fait pour moi. »
Quand Rayan était au secondaire, il s’est mis à aider avec passion partout au Canada des enfants qui avaient eu moins de chance que lui. Il a lancé sa propre entreprise sans but lucratif, qu’il a nommée Unique United. Son entreprise lui a permis de donner pour 40 000 $ d’équipement à une jeune équipe de hockey du Nunavut. Je lui ai demandé pour quelle raison il pensait qu’il était important de faire cela, et il m’a répondu : « Les enfants sont victimes des circonstances. Il est bien trop facile d’oublier ces enfants désavantagés au Canada. De façon générale, qu’ils soient nés ici où qu’ils soient arrivés comme immigrants ou réfugiés, nous les abandonnons beaucoup trop rapidement. Je l’ai constaté dans des écoles et dans des programmes parascolaires, où l’on manque de ressources pour aider les enfants qui ont besoin de plus d’attention. Il s’agit souvent d’enfants qui ont de la peine à apprendre la langue ou à s’adapter à la société canadienne. Bien souvent, les parents travaillent du matin au soir, ils parlent mal l’anglais et ont beaucoup de peine à aider leurs enfants à faire la transition. »
Dans notre rôle de membres de la plateforme N4, alors que nous reconnaissons le manque de soins et de soutiens aux nouveaux arrivants et que nous essayons de le combler, il est crucial que nous tenions compte de la vulnérabilité des enfants réfugiés et immigrants. Partout au Canada, ces enfants et ces jeunes adultes ne disposent pas des ressources qu’il leur faut, qu’il s’agisse du domaine scolaire, de la santé, du système juridique ou autre. Ils n’ont pas ce qu’il leur faut pour résoudre les problèmes auxquels ils se heurtent dans leur nouvelle vie. Ils sont souvent obligés d’assumer plus de responsabilités à la maison, d’aider leurs frères et sœurs et leurs parents. Les recherches que j’ai menées pour écrire cet article m’ont révélé bien des choses. Tout au long de mes études, je n’ai jamais vraiment pensé aux réalités auxquelles les enfants et les jeunes adultes réfugiés se heurtent. Même maintenant, si je devais quitter le Canada pour toujours, je serais traumatisée, surtout dans les circonstances qu’un grand nombre de ces enfants ont dû fuir. Dès qu’ils arrivent chez nous, de nombreux réfugiés doivent assumer d’énormes responsabilités pour recevoir de l’aide sociale et gouvernementale. Les traitements de faveur n’existent pas, malgré ce que pensent de nombreux Canadiens. J’ai découvert que lorsque les parents assument ces responsabilités pour s’adapter à la vie canadienne, ces obligations pèsent plus lourd sur les épaules des jeunes membres de la famille. Ces enfants veulent aider leurs parents à apprendre la langue, à prendre soin de leurs frères et sœurs pendant que les parents travaillent. Ces enfants atteignent l’âge de la maturité beaucoup trop rapidement.
Millie Lazovic, étudiante à l'université Carleton
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