Ce que mon enfance vécue au Canada m’a permis de comprendre sur la vie des filles partout dans le monde
Le 11 octobre, Journée internationale de la petite fille des Nations unies, nous donne l’occasion de réfléchir aux avantages de grandir en tant que fille au Canada. Beaucoup de choses que nous tenons pour acquises ne sont malheureusement pas offertes aux jeunes filles partout dans le monde. Dans certains coins du monde, les filles n’ont pas la possibilité d’aller à l’école, de travailler, de conduire une voiture ou même de s’exprimer librement. Ce qui peut nous sembler être des choses de la vie quotidienne peut paraitre comme un idéal inaccessible aux yeux des filles des pays en développement et ravagés par des catastrophes naturelles ou des conflits.
Cette année, le thème de cette Journée est « Ma voix, l’égalité pour notre avenir » et les filles du monde entier ont formulé trois demandes :
- Mener une vie sans violence fondée sur le genre, sans pratiques néfastes (telles que le mariage des enfants et les mutilations génitales), sans VIH et sida ;
- Acquérir de nouvelles compétences pour l’avenir qu’elles choisissent ;
- Diriger une génération d’activistes qui accélèrent le changement social.
Des statistiques choquantes que je viens d’apprendre montrent que 650 millions de filles dans le monde ont été mariées dans leur enfance, et plus de 200 millions ont subi des mutilations génitales féminines. Ces filles sont retirées de l’école lorsqu’elles sont mariées et n’ont jamais l’occasion de se faire des amis, de jouer pendant la récréation et de grandir entourées d’enfants de leur âge. Quand j’étais plus jeune, j’avais peur de me lever à 7 ou 8 heures du matin pour me préparer à aller à l’école. Maintenant, en y pensant, je me rends compte de la chance que j’avais vraiment d’avoir cette opportunité.
L’ONU estime qu’environ une fille sur quatre entre l’âge de 15 et 19 ans n’a pas d’emploi et n’est pas scolarisée. Ce chiffre est particulièrement choquant si on le compare à celui des garçons : 1 garçon sur 10. En tant qu’étudiante à l’université de Carleton, je ne peux pas imaginer ce que serait l’école sans les femmes comme pairs et professeurs. Je trouve que lorsqu’on vit au Canada, on perd souvent facilement de vue les dures réalités auxquelles sont confrontées de nombreuses filles qui vivent dans d’autres parties du monde.
J’ai récemment demandé à l’un de mes professeurs, la Dre Marylynn Steckley, ce qu’elle pensait des inégalités auxquelles les filles sont confrontées et des changements qui doivent prendre place dans le monde entier. Voici ce qu’elle m’a répondu : « Nous savons que partout dans le monde, les filles ont moins accès à l’éducation de base. Toute une série de facteurs empêche les filles d’aller à l’école notamment les responsabilités domestiques, le fait de privilégier les garçons pour le financement de l’école, le manque de confiance en soi, la discrimination sexuelle et la stigmatisation. Et si vous pensez que l’inégalité entre les sexes dans l’éducation est un problème seulement dans les soi-disant pays du Sud, détrompez-vous. L’année dernière encore, alors que mon fils se débattait en français, son enseignant m’a dit : “Eh bien, vous savez, c’est naturel. Je déteste le dire, mais les filles sont meilleures en français et les garçons en mathématiques”. Les stigmates sont profonds.
À mon avis, deux changements doivent se produire pour aller de l’avant : les jeunes filles ont besoin de soutiens matériels pour saisir des possibilités d’apprentissage significatives. Cela signifie qu’il faut des fonds destinés aux filles et à leurs familles, afin qu’elles puissent avoir des chances égales de s’asseoir à la table des négociations, et des ressources consacrées à l’amélioration des environnements d’apprentissage qui tiennent compte des différences entre les sexes. Il faut également un changement idéologique au niveau de la société. Il faut se mettre au diapason de l’époque, car les filles ont les mêmes capacités cérébrales que les garçons, cessons de les faire se sentir petites. Il y a beaucoup de RBG, Frieda Kahlo et Wangari Maathai dans le monde dont l’apprentissage et la croissance sont limités à cause de leur anatomie. Arrêtons cela, et donnons enfin aux filles le bon départ qu’elles méritent, nos sociétés s’en porteront mieux ».
C’est incroyable de voir les mêmes opportunités qui m’ont été données, offertes à d’autres femmes et filles qui viennent au Canada en tant qu’immigrantes ou réfugiées. Des femmes comme ma mère, qui est venue au Canada juste avant de m’avoir, ont changé de carrière et ont créé une vie pour leur famille ici. Il en est de même de tous mes amis étudiants étrangers de l’université qui sont tellement liés à leur culture individuelle, mais qui ne peuvent pas imaginer vivre ailleurs qu’au Canada.
Lorsque l’on pense aux jeunes femmes puissantes et influentes, la liste des exemples qui nous viennent à l’esprit est longue. Je pense à Malala Yousafzai, qui défend avec conviction l’éducation et l’égalité des chances pour les jeunes femmes. Elle est née au Pakistan d’un père instituteur qui s’est assuré qu’elle avait le même accès à l’éducation que les garçons. Lorsqu’elle avait 11 ans, les talibans ont pris le contrôle de son village et, sur leurs ordres, elle n’a plus été autorisée à aller à l’école. Elle est devenue une cible dès qu’elle a commencé à s’exprimer publiquement sur le droit des filles à l’éducation et, en 2012, elle a reçu une balle dans le côté de la tête alors qu’elle se trouvait dans un bus scolaire. Malala s’est rétablie, a déménagé au Royaume-Uni avec sa famille et est allée à Oxford. Elle a continué à défendre la cause des filles partout dans le monde et est la plus jeune lauréate du prix Nobel de la paix.
Je pense aussi à Greta Thunberg, une militante écologiste de 17 ans, qui a attiré l’attention des gens à travers la planète avec sa grève scolaire contre le changement climatique. Cela a inspiré des jeunes partout dans le monde à participer à leurs propres grèves scolaires et en a motivé beaucoup d’autres à s’engager dans d’autres voies. Greta a pris la parole aux Nations unies, a fait publier des essais par des journaux suédois et a inspiré une génération de militants contre le changement climatique (https://time.com/person-of-the-year-2019-greta-thunberg/).
Enfin, je pense à Yeonmi Park qui a fui la Corée du Nord à l’âge de 13 ans et est devenue une militante des droits de l’homme. Elle et sa mère ont fui en passant par la Chine et la Mongolie où elles ont été victimes de trafic, d’agressions sexuelles et ont été vendues comme des animaux. Une fois arrivées en Corée du Sud, Yeonmi et sa mère ont finalement été libérées. Yeonmi s’est exprimée lors de nombreux engagements sur la brutalité du régime Kim et la vie sous la dictature. Elle a parlé de son évasion lors de son discours au sommet One Young World et continue de dénoncer les violations flagrantes des droits de l’homme en Corée du Nord aujourd’hui. Il existe des millions d’autres jeunes femmes qui influencent leur entourage par leur courage et leur force et nous ne devrions jamais oublier à quel point les jeunes filles sont vraiment puissantes.
Ainsi, le 11 octobre, je vous mets au défi de réfléchir à la façon dont votre vie serait différente sans toutes ces femmes étonnantes et courageuses qui sont dans votre domaine de travail ou dans votre vie. Toutes ces femmes ont eu autrefois le même âge que les jeunes filles du monde entier qui se battent pour avoir la possibilité d’apprendre, d’être respectées, de se libérer des stéréotypes sexistes et d’avoir les mêmes chances que tout le monde.
Millie Lazovic, étudiante à l'université Carleton
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